15 août 2011

Heidemarie Schwermer: sortir de la société de consommation ou devenir un fardeau pour les siens?

Aujourd'hui, en me rendant sur ma boîte pourriel - c'est très important de toujours avoir une boîte pourriel afin de pouvoir répondre à des sondages ou à des questionnaires qui ouvriront la porte à une pluie de spams par la suite - j'ai été interpellée par l'une des nouvelles de voila.fr: "Heidemarie Schwermer, le choix d'une vie sans argent." 

En résumé, il s'agit d'une dame de soixante-neuf ans qui, depuis quinze ans, se refuse à utiliser de l'argent dans sa vie courante. Pour vivre, elle allie le troc à l'échange de services et, selon ses propres dires, elle redistribue tout l'argent qu'elle possède à son entourage. En fait, plus je réfléchis à son action, plus je la trouve un tantinnet hypocryte. Je m'explique: je ne remets pas en cause les motivations de cette dame - je suis persuadée qu'elle pense sincèrement mener une lutte réfléchie sur la société de consommation. Pourtant, par les choix de vie qu'elle fait, elle dépend plus qu'aucun autre de celle-ci. Si elle voulait véritablement se retirer du système, il aurait fallu qu'elle se terre dans un coin de bois, où elle aurait construit sa propre cabane et se serait nourrie de racines ou de tomates qu'elle aurait elle-même plantées (j'exagère à peine). De cette façon, elle aurait pu, en effet, se vanter de s'être détachée de notre société de consommation. En revanche, en procédant comme elle fait - c'est à dire en demandant l'aide d'associations alimentaires, en récupérant les invendus ou les légumes de ses copines, elle ne fait, selon moi, que profiter du système de manière indirecte. Les produits de ses amies, les restes des magasins bios et, surtout, les groupes d'aide alimentaire appartiennent à la société de consommation qu'elle prétend fuir et ne sont, en général, que des rustines sur ses failles. D'ailleurs, demander de l'aide aux associations alimentaires me choque d'autant plus que cette madame Heidemarie pourrait très bien s'acheter de la nourriture elle-même mais s'y refuse par principe: en clair, ses bonnes intentions l'empêchent de dépenser son argent pour se nourrir, mais non d'aller chercher des vivres qui ont été achetés par des associations dont la fonction première est de pallier la pauvreté des individus. En agissant de la sorte, non seulement elle utilise indirectement de l'argent (celui des autres) mais elle "prive" des personnes qui n'ont véritablement pas les moyens de s'acheter du pain, de leur part de nourriture. 

Notez que je n'ai rien contre l'idée de chercher à vivre sans argent. Au contraire, je trouve ça très bien que certaines personnes aient envie de se libérer de l'emprise toute puissante de ce bout de papier dans leur quotidien. Mais je ne vois pas très bien la cohérence entre cette pensée et le fait de se sustenter par des moyens qui sont directement issus de la société de consommation. Cela transforme finalement cette dame en "fardeau volontaire" pour la société, pour sa famille et ses amis - qui ne vont bien-sûr jamais refuser de lui donner quelques légumes. En outre, la vie que mène Heidemarie n'est possible que si elle dispose d'un cercle social suffisant pour lui permettre d'assurer son hébergement temporaire, sa nourriture et sa sécurité. De la même manière, le choix de se priver de son assurance maladie n'est viable que si elle ne lutte pas contre une maladie grave. Si par malheur cette dame développait un cancer ou autre maladie mortelle, son retrait du système de santé  poserait de graves problèmes - en particulier pour sa famille qui refuserait évidemment de la regarder souffrir sans rien faire, en raison de ses choix de vie. 

Bref, cet article me laisse dubitative. J'ai le sentiment que Madame Schwermer s'est trompée dans ces choix d'action. Elle prétend vouloir éveiller les gens à une société de partage, plus encore que de troc, mais cela me paraît difficile à l'échelle d'un pays et, à fortiori, plus encore à l'échelle de la planète. Ceci dit, peut-être que je me trompe...

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