28 septembre 2011

Désillusion brutale d'une fin de thèse.

Lorsque j'ai commencé mon Doctorat, j'étais armée d'une volonté indéfectible de montrer au monde entier que j'étais capable de relever cet ultime défi scolaire. Je voulais que mon papa soit fier de moi, que ma maman ait des raisons de l'être, que ma famille et mes amis se disent que, peut-être, finalement, je valais quelque-chose. Au fur et à mesure que j'avançais, je me rendais compte de la difficulté de ce pari: une bonne thèse est une thèse terminée, nous répétait souvent mon directeur français. C'était vrai: le plus dur était de trouver l'énergie, la motivation pour continuer les recherches, pour étudier, examiner, analyser les documents afin de produire, à la fin, une thèse digne de ce nom. Le Doctorat, ça n'a rien à voir avec la maîtrise ou d'autres diplômes pour lesquels un mémoire est demandé: là, il faut être original, novateur, persévérant et, surtout, autonome. Car on n'est jamais plus seul que lorsqu'on réalise un Doctorat. Bien-sûr, il y a les amis, ceux qui partagent votre galère sur le long chemin de l'ultime diplôme, et il y a aussi les directeurs qui, au hasard des couloirs, vont balayer d'un revers de main toutes vos recherches ou, au contraire, vous encourager. Mais, au final, vous êtes seul.

J'ai réussi. Ma thèse n'est pas parfaite, évidemment, mais elle est terminée, déposée et elle est le fruit de quatre années de recherches intensives. Il ne reste que la soutenance. Dans les faits, je pensais que c'était un genre de formalité: bien-sûr, j'aurais des questions et la présentation orale de mon travail va me demander une certaine préparation, mais je n'imaginais pas que l'on remettrait en cause ma thèse: après tout, elle a été déposée. Encore un indice de ma naïveté, je suppose. Hier, j'ai reçu tous mes rapports de jury: si quatre sont conformes à ce à quoi je m'attendais, soulevant à la fois les bons et les mauvais points de mon travail, le cinquième pourrait s'apparenter à un lynchage contrôlé de mon produit final. Sur six pages, l'auteur se lance avec une aigreur presque tangible dans le dénigrement de mes méthodes de recherche, de mes hypothèses, de mes démonstrations et va même jusqu'à remettre en cause la quantité d'efforts investie dans cette thèse. En toute honnêteté, je l'ai mauvaise. Vraiment. Que mes recherches ne soient pas parfaites, j'en conviens aisément: si seulement c'était possible, nous y passerions non pas quatre ou six ans mais bien le tiers de notre vie. Il y aura toujours quelque chose de plus à examiner. En revanche, sous-entendre que j'ai, pardonnez l'expression mais c'est à peu de choses près ce que l'auteur insinue, "torché" mon travail afin de rendre un espèce de brouillon infâme, c'est particulièrement blessant. Surtout qu'à la différence des autres membres du jury, il ne suggère rien - se contentant de critiquer largement mes choix. (Ce qui est limite incohérent avec sa mention (Bien) qui, si elle n'est pas la panacée pour un Doctorat, n'est quand même pas l'indice d'un échec aussi total qu'il s'évertue pourtant à le prétendre dans son rapport). 

Finalement, ma soutenance est dans une semaine et je sais que je devrais faire face à cet homme, que je n'ai vu, en tout et pour tout, qu'une fois et qui est si intimement persuadé de mon incompétence. Ce n'est certes pas la situation la plus favorable à laquelle je pouvais espérer m'attendre. Mon Yankee préféré me dit que, au pire du pire, mon exécution publique ne durerait que trois heures dans une vie. Indéniablement. Mais cela ne change rien à la brûlure du dénigrement: mon travail, sans être la meilleure thèse de l'année, méritait bien mieux que cette avalanche d'insinuations et de mépris. Pour preuve, sur cinq membres du jury, cet homme est le seul à vomir à ce point dessus...

24 septembre 2011

L'Eden est à notre porte.

Il existe un endroit pour chacun de nous. Un lieu qui nous appaise, nous réconforte et nous rassure. Nous passons souvent notre vie entière à la recherche de cet Eden, sans vraiment nous en rendre compte. Aujourd'hui, on peut même faire le tour de la planète, persuadé que la prochaine escale sera encore meilleure que celle que nous venons de faire. Pour certains, c'est une plage de sable blanc avec l'océan pour horizon. Pour d'autres, c'est les vertes prairies qui s'étendent à perte de vue dans les montagnes. Et puis il y a aussi les amoureux des villes, ceux qui parcourraient la Terre entière pour un coin de forêt ou encore ceux qui rêvent en silence d'une place au bord du Paradis. Cette Terre Promise, on nous en parle depuis des siècles et elle est pourtant si différente pour chacun de nous. Tant mieux, d'ailleurs, car elle ne serait pas assez grande pour l'humanité toute entière...

Mon Eden, c'est un coin de la planète assez peu peuplé, où la terre est si sèche qu'elle vous pique les yeux, les jours de grand vent. Il paraît qu'autrefois, il était couvert de bois et riche d'une abondante faune. Aujourd'hui, seuls les sangliers trouvent leur compte dans la multitude de champs de tournesols ou de maïs qui parsèment la région. Sur ces terres, se dressent des bâtiments en brique rouge - vestiges d'un passé heureux où j'accompagnais ma tatie garder les vaches et dévorais, en secret, les croquettes-boutons du chien (elles étaient excellentes, d'ailleurs). Derrière l'ancienne grange, se dresse un arbre dont j'ignore le nom. Il est plus vieux que je ne le serai jamais - témoin immobile du temps qui passe, des générations d'enfants qui s'ébattent dans le champs, de la renaissance perpétuelle des majestueux tournesols. Et puis, il y a les bois. Silencieux, ils se dressent au bout de mon Eden, protégeant les traces de mon enfance avec plus d'efficacité que ma mémoire ne saurait le faire. Ils gardent en leur sein nos rires d'enfants, alors que nous construisions la plus grande cabane du monde, sans branche ni feuille: une cabane creusée à même les bois, meublée des vieilleries que nous trouvions dans la grange, et dans laquelle les plus belles histoires se déroulaient. 

Je me suis toujours demandé pourquoi certains artistes exilés étaient plus lyriques lorsqu'ils parlaient de leur bout du monde. Une sorte de témoignage sur leur pays, pour lui exprimer leur attachement, pour lui rendre hommage ou peut-être seulement pour soulager leur nostalgie alors même qu'ils en étaient, parfois, partis volontairement. Aujourd'hui, je comprends que c'est aussi pour ne pas oublier. Quoi qu'on fasse, où qu'on aille, on ressent ce besoin de ne jamais couper complètement nos racines. Oublier d'où l'on vient, ce serait un peu comme devenir orphelin - d'ailleurs, ne parle-t-on pas de pays d'adoption lorsqu'on trouve un autre port d'attache?

18 septembre 2011

Les affres d'une nouvelle vie.

Attendre. Espérer. Avoir le coeur qui bat à tout rompre lorsque le téléphone sonne et puis, finalement, être presque déçue que ce ne soit qu'un coup de fil ordinaire. Chercher un travail, parfois, c'est un peu comme tomber amoureuse pour la première fois.

Lorsque je rédigeais ma thèse, j'avais hâte de pouvoir envoyer des candidatures, de prendre ma vie en main et de rentrer sur le marché du travail. Ce que je n'avais pas trop prévu, cependant, c'est que nous serions plusieurs dans ce cas et que ma candidature resterait souvent lettre morte. En fait, assez ironiquement, je n'ai jamais eu de mal à trouver un boulot jusqu'ici: que ce soit pour un travail d'été ou étudiant, j'étais sûre de trouver preneur dans le milieu agricole, hôtelier voire de la vente. Faut dire que lorsque tu veux juste gagner de quoi acheter ton pain quotidien ou financer ton prochain voyage en Europe, tu ne penses pas forcément aux quarante prochaines années de ta vie. Après tes études, par contre, ça te paraît une donnée importante et tu t'aperçois alors, durement, que la chance de faire un boulot qui plaît n'est pas donnée à tout le monde. 

Remarquez, je ne devrais pas me plaindre. Pas déjà. Après tout, ça ne fait que quelques mois que je cherche et je crois que je n'ai même pas atteint la moyenne d'embauche des jeunes diplômés (qui est de cinq mois, si je ne m'abuse).Pourtant, ça m'angoisse au plus haut point. On dirait que d'avoir terminé ma thèse n'est pas parvenue à me convaincre que je valais vraiment quelque chose. Au contraire, je ressens la morsure du temps qui passe et je regarde, un pincement au coeur, toutes ces années durant lesquelles je n'aurais jamais rien fait d'autre qu'être un poids pour ceux que j'aime. L'éternelle étudiante que je suis est arrivée au bout de sa course, plus démunie de confiance en elle qu'à ses débuts. C'est ironique. C'est comme si mon insignifiance en tant qu'être humain me sautait d'autant plus au visage que je n'ai plus d'objectif à atteindre pour prouver ma valeur - ou plutôt que l'atteinte de cet objectif n'a, en fait, rien changer. Je n'arrive pas à bailloner les angoisses qui me taraudaient la nuit et je les sens, au contraire, gagner du terrain en envahissant mes journées.

Souvent, avec mon Yankee préféré, j'ai débattu du sens de notre existence. Un genre de discussion philosophique autour d'un thé ou d'un chocolat chaud qui ne fera pas avancer la planète mais qui nous remet en question. Partisane de la théorie de l'accident humain, je défends généralement cette idée que nous ne sommes rien et que nous ne servons à rien: ce sont les choix que nous ferons dans notre vie qui détermineront notre utilité, au moment de rendre les clés de la vie. C'est vrai que cette vision est assez angoissante car finalement, elle revient à dire que nous ne sommes que de l'herbe à vache en puissance et que seul le vide nous caractérise. Un vide vertigineux, que nous tentons de combler avec nos rêves et nos espoirs, nos déceptions et notre vie sociale. Mais lorsque tout s'éteint, que l'on se retrouve seul avec soi-même, alors le vide reprend ses droits et il nous faut fermer les yeux pour ne pas tomber. Aujourd'hui, je m'accroche à l'espoir de trouver ce travail qui justifiera ces années passées, qui sera la juste rétribution de tous les cadeaux que la vie m'a fait, qui me permettra de rendre un peu de ce bonheur si injustement partagé. Je m'agrippe à cette perspective et je guette le téléphone, le coeur battant. Ce n'est pas seulement l'employeur que j'attends: c'est mon droit d'exister...

12 septembre 2011

Dérapage policier à Montréal: quand un imbécile fait le jeu des anarchistes.

Honnêtement, je suis plutôt une partisane du Juste Milieu: rien n'est noir ou blanc, personne n'est bon ou mauvais, etc. En gros, je ne suis pas une adepte des jugements arrêtés et indiscutables du type: "tous les policiers sont des cons". Personnellement, lorsque je vois des images du G quelque-chose avec un harde de jeunes en furie qui jettent des cailloux sur les agents, les invectivent, la bave aux lèvres, je ne comprends pas pourquoi tout le monde s'insurge que les dits agents aient quelque peu secoué les jeunes intrépides. D'ailleurs, c'est tellement toujours pareil que j'ai fini par penser que c'était une sorte de rituel ou de sport national pour une poignée d'anarchistes en mal d'activités... Bref, je ne suis pas de ceux qui critiquent à tout bout de champs la police. Pourtant, lorsque je vois ce type de vidéo, je ne peux que me rendre à l'évidence: si les cons sont partout, c'est encore plus évident lorsqu'ils sont en position de force:

A l'instar de Patrick Lagacé - à qui j'ai piqué la vidéo - ce n'est pas tant l'intervention des policiers à l'endroit des jeunes garçons qui me gêne: je n'ai aucune idée du contexte et c'est vrai que ça doit être désagréable de se faire injurier par une platrée de petits cons complétement saoûls à longueur de nuit. Ce qui me pose problème en revanche, c'est la réaction du policier par rapport à la fille qui vient en aide au jeune, tombé à terre (1.28mn). Que le gars veuille arrêter le type en question, je le conçois, mais qu'il emplâtre volontairement la fille dans un poteau pour pouvoir le faire, c'est un petit peu, comment dirais-je?, irresponsable? abruti? Je ne sais, les mots me manquent. Sans faire de ce personnage doué d'une bêtise rare le symbole de la police au complet, il est indéniable qu'il n'aide pas ses confrères à redorer leur image. Non seulement, il fait usage de violence gratuite mais en plus, histoire de vraiment monter que ce n'était pas un accident (genre: quelqu'un a placé le poteau sous le visage de la fille pendant qu'il regardait ailleurs), il ne se porte pas à son secours, il ne s'excuse pas et il la menace de l'accuser d'avoir fait entrave à son travail....

Le pire dans tout ça - et ce qui n'aide pas plus la cause de la police - c'est que si ce policier doit répondre de ses actes, il va être protégé par tout le monde: ses collègues, sa direction, la justice... Alors qu'il est manifestement en tort. Je suis persuadée que si la police et la justice étaient moins biaisée, punissaient les erreurs des imbéciles lorsqu'elles étaient établies, les défenseurs de l'idéologie "Fuck la police" auraient beaucoup moins de succès. Car on a besoin d'une police pour vivre harmonieusement en société, c'est évident, mais on n'a pas besoin d'un groupe d'enfants gâtés qui abusent de leur pouvoir sans jamais être punis, juste parce qu'ils sont "solidaires" entre eux. Si la police devient une sorte de secte impénatrable, étanche à toute forme de justice alors qu'ils en sont la main exécutante, il ne faut pas espérer que le cynisme à son égard s'estompe...

7 septembre 2011

Les dérives de l'Ego en mal de caresses.

L'Ego. Le "moi" latin ne se sera jamais autant fait caresser que dans nos sociétés contemporaines. Ce n'est pas une nouveauté et c'était un peu prévisible puisque l'objectif avoué des règles économiques qui régissent les grandes puissances de ce monde est de faire gagner le plus d'argent possible à quelques particuliers. Nous sommes donc bien loin des valeurs communautaires de partage qui interdiraient toute suprématie de l'individu sur le groupe. Notez que ce ne serait pas forcément un meilleur système: anihiler son être au profit des autres n'est pas plus source d'épanouissement que son aliénation...

En fait, ce qui me pousse à m'interroger sur les dérives de cet individualisme croissant, c'est sa propension à envahir toutes les sphères de notre quotidien. Il n'est pas nouveau que Facebook, par exemple, est une plate-forme destinée, d'une part, à "espionner" la vie des autres et, en second lieu, à se flatter l'Ego avec un grand "E". Il n'y a qu'à voir la proportion de personnes qui prennent quantité de photos de leur propre personne - non pas en guise de souvenir de voyage ou d'événements mais bien d'eux-mêmes par eux-mêmes d'ailleurs. Une fois mises en ligne, il y a toujours quelques "amis" facebook pour venir s'extasier sur combien ces modèles improvisés sont beaux, rayonnants, magnifiques, etc. Vous me direz: pourquoi pas? Elles ont bien le droit! Et je ne pourrai qu'en convenir. Pourtant, une part de moi ne peut s'empêcher de trouver ce comportement très présomptueux. Je m'explique: les personnes qui mettent en ligne ce type de photos - qui sont, je le répète, ni des souvenirs, ni des photos prises par Autrui - doivent le faire spécifiquement pour se faire brosser dans le sens du poil. Venant de jeunes demoiselles adolescentes, passe encore: on a tous eu une période où on jouait les grands - simplement maintenant il existe le Net pour mettre ces photos. Par contre, pour des adultes, je ne peux m'empêcher de trouver ça...particulier. Enfin, je ne suis sans doute pas très objective, étant donné mon amour pour les photos de ma personne.

Mais il n'y a pas que sur Facebook que cette explosion du Moi se fait sentir. La télévision est sans doute le principal actionnaire de ce mouvement: à Radio Canada, dernièrement, ils ont lancé une émission de variétés qu'ils ont baptisé du nom de l'animatrice - Pénélope McQuade. Pourquoi??? Je veux dire: l'émission ne va pas parler de sa vie! Pourquoi mettre l'accent sur cette fille plutôt que sur le but de l'émission? C'est un peu comme si Tout le monde en Parle s'appelait Guy A. Lepage ou que Les enfants de la télé répondaient au doux nom de Véro! C'est vraiment bizarre. Surtout que, en toute subjectivité, c'est probablement l'une des animatrices les plus insipides que j'ai jamais vues... 

Bref, nous sommes dans une phase de société où tout un chacun éprouve le besoin de se frotter l'Ego, de sentir le regard bienveillant des autres sur soi. On pourrait se demander si ce besoin de reconnaissance n'est pas lié à un vide plus grand au fond de nous, en tant qu'individu, mais ce serait sûrement faire de la psychologie de ruelle...