22 juillet 2011

Le Neverland de Peter-Pan!

Oui je sais. Après deux mois, je n'ai presque plus le droit de revenir comme une fleur et d'écrire que le monde est toujours en train de tourner. À vrai dire, je n'ai même pas une bonne excuse pour ne pas avoir écrit ces dernières semaines: les sujets, le temps, l'envie même y étaient. Mais faut croire que l'enthousiasme de retrouver mon coin de pays était plus fort que celui de tapoter un clavier d'ordinateur, à décortiquer les mouches et les moustiques qui occupent au quotidien nos sociétés. Sans doute un contrecoup de ma déprime printanière. Remarquez, je ne peux pas dire que mon retour au Québec est un choc thermique et climatique important: il fait chaud. Tellement, d'ailleurs, que tout citoyen digne de ce nom a démarré son système de climatisation pour échapper à l'humidité ambiante. Perso, j'aime pas trop. Parce que la climatisation, ça rend malade pis parce que je n'ai pas chialé durant six mois que je gelais pour me cryogéniser volontairement en été. Mais bon, chacun son truc.

Le retour à Montréal s'est donc fait sous le soleil mais il s'accompagne, une nouvelle fois, de ce sentiment de solitude crasse qui imprègne chacune de mes fins de "voyage". Vivre à l'étranger, tous les magazines vous le diront, ça "ouvre l'esprit", ça "permet de connaître autre chose" et ça vous "enrichit". C'est indéniable. Mais vivre entre deux mondes, c'est aussi s'isoler des deux. Une solitude qui s'érige comme un mur transparent entre le voyageur et ses proches, sans que nous en ayons vraiment conscience. Lorsque je rentre en France ou lorsque je reviens au Québec, je suis à la fois heureuse et triste. Profondément triste. Au début, je pensais que c'était parce que, où que j'aille désormais, je laisserai toujours des gens que j'aime derrière moi. Mais c'est aussi l'impression lancinante que je n'appartiens à aucun des deux mondes. En retrouvant mes amis ou ma famille en France, je ne peux leur rendre ma vie au Québec autrement que par des mots si vides qu'ils ne semblent même pas résonner dans la conversation. Et il en est de même lorsque je franchis à nouveau l'océan. Deux mondes que je côtoie sans jamais véritablement les pénétrer. Vivre à l'étranger, c'est aussi accepter cette forme de solitude ineffable et lancinante. 

L'autre jour, je devisai avec ma cousine sur les changements de notre société. Elle me disait, entre autres, que les anciennes générations qui n'avaient que rarement les moyens de voyager, à fortiori encore moins aussi loin que nous aujourd'hui, finissaient par s'installer et vivre sans être vraiment heureux car ils n'avaient jamais rien connu d'autre. Personnellement, je me demande encore si le voyage et la vie à l'étranger sont les clés pour nous rendre vraiment heureux - si tant est qu'il y ait une clé pour ça. Ils nous enrichissent, sans aucun doute, et nous apportent mille joies au quotidien. Mais, d'un autre côté, ils nous privent de nos racines. Sans cesse en mouvement, on ne s'arrête jamais assez longtemps pour véritablement sentir qu'on appartient à quelque-chose, qu'on fait partie d'un plus grand ensemble. Finalement, on a beau partager sentiments et bonheur avec nos proches, il reste toujours une petite part de nous qui ne peut parvenir à trouver les mots pour rendre la vie d'ailleurs aussi vivante pour ceux d'ici: cela nous transforme en bête curieuse, un peu à l'écart de tous. C'est une bien étrange sensation qui, si elle s'estompe après quelques semaines, ne tarde jamais à réapparaître au prochain voyage, au prochain séjour dans l'"autre" monde - celui que ceux d'ici ne touchent pas et que nous-mêmes ne partageons que par intermittence. Parfois, j'ai peur de disparaître complétement de ces deux mondes. À force d'être entre les deux, je songe que je pourrais disparaître sans créer de vide puisque, finalement, je n'appartenais à aucun des deux. Bien-sûr, ce n'est qu'une angoisse ridicule...