LIBRE! Depuis dimanche...
-"On croirait que tu sors de prison!"
Essayez de ne pas sortir de chez vous durant huit jours, vous allez constater que la prison a une étoile de plus en matière de liberté: se rendre au réfectoire pour dîner permet à son résident de réaliser plus de dix pas dans la journée. Pour ma part, mon plus long trajet en comptait sept. De fait, je peux claironner: LIBRE avec des accents de vérité dans la voix! ^_^ Remarquez, tout ne s'est pas déroulé aussi bien que je l'imaginais. Forcément, lorsque l'activité physique la plus exigeante que l'on réalise depuis une semaine est de mettre son assiette de soupe au micro-ondes, les séquelles de fatigue du corps ne semblent pas si importantes. Oui mais voilà: grisée par l'air frais sur ma peau, je me suis emballée: dimanche, j'ai pris le métro pour aller sur l'avenue Mont Royal dans l'espoir de trouver un portefeuille (pas sur la rue, bien sûr: dans un magasin!). Trois stations et dix minutes de marche plus tard, je rentrai dans une librairie.
-"Pour un portefeuille?"
Oui, je sais. Je suis passée devant et mon magasin n'ouvrait qu'à midi... Bref, je rentre dans la Bouquinerie Saint Denis et défaille. Mon corps, par ailleurs dépourvu de tout signe extérieur de souffrance, décide qu'il a atteint son quota d'efforts pour la journée et me conseille fortement de m'assoir si je ne veux pas avoir la honte de choir dans une étagère remplie de livres. D'ailleurs, il n'attend pas ma réponse et je me retrouve assise devant un panel d'ouvrages historiques avant d'avoir réalisé que les troubles oculaires que je percevais n'étaient pas dus aux néons. Je réalise alors que mon corps a autant d'énergie en réserve que si je venais de traverser le Canada sur une jambe: problématique, étant donné ma situation géographique. En outre, en coin, je remarque que le vendeur se doute que je ne me suis pas assise pour analyser les auteurs qui ont écrit sur la première Guerre Mondiale: il me regarde, l'œil inquisiteur. L'orgueil est une vaste capacité qui permet autant le pire que le meilleur: il m'a, à cet instant, permis de me saisir de mes quatre livres, de les payer et de porter mon enveloppe charnelle jusqu'à la librairie de voyage où travaille une de mes amies. Là, je me rassois dans l'unique fauteuil du magasin, le teint olive. J'avais initialement prévu une longue promenade pour me remplir les poumons de tout l'air pollué dont ils avaient été privé durant une semaine: autant dire que la perspective m'apparaissait, désormais, moins raisonnable que de boire une bouteille de vodka d'un seul trait. Après une heure de repos, je m'en retournai, penaude, à mon douillet chez-moi. Apparemment, la fin de la grippe ne rime pas avec la fin de la fatigue.
Cela dit, comme j'aime les proverbes, j'ai voulu appliquer complétement celui déclamant que les expériences forment la jeunesse. J'ai remis ça, indifférente aux tristes conséquences de la veille. Ainsi, hier, je tentai une autre sortie, devant aller me faire prendre en photo pour mon dossier de résidence permanente et, tout de même, travailler un peu. J'arrivai au photographe emplie d'énergie. Le temps de débourser, une larme à l'oeil, vingt dollars pour quatre malheureuses photos d'identité, j'étais dans le métro, direction le bureau. Trois heures plus tard, devant mon écran d'ordinateur, je constatai, perplexe, que ma forme physique ressemblait à celle des lendemains de veille. Sauf que je n'ai pas fêté depuis deux semaines au moins. Mais qui dit lundi, dit Kung Fu. Après une semaine où j'avais raté tous les cours, je tenais à revenir sur les vieux tatamis du dojo. Bon, soyons honnêtes, l'orgueil ne contrôle pas tout: après le premier cours, j'imaginais mon lit avec tant de précision que j'aurais pu me coucher sur les dits tapis de sols verts marécage. Je m'éclipsai donc, sans tambour ni trompettes, espérant que ce matin serait plus efficace: il fut pire encore. Je m'endormais toutes les dix minutes en gardant ma nièce. L'interactivité n'a pas été ma caractéristique première mais cela n'étonnera personne. Il semblerait que certains départements ne soient pas ouverts à l'option "volonté" dans le corps et la lutte contre le sommeil entre dans cette catégorie.
En clair, mon corps et moi, nous nous sommes déclarés la guerre: lui réclame une sieste aux deux heures, je ne lui en accorde qu'une après le dîner. Il faut dire que je ne la contrôle pas: un genre d'évanouissement sur le canapé, avec mon travail sur les genoux. Pour l'instant, le corps a l'avantage mais je ne perds pas espoir de lui montrer le non sens de ces réclamations: pour pouvoir s'offrir une sieste aux deux heures, il me faudrait avoir moins de deux ans ou, encore, m'apparenter à un ours, entamant son hibernation annuelle. A priori, je ne satisfais / aucune de ces conditions...
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