24 mai 2011

Jusqu'où irons-nous dans la désinformation?

Vous allez dire que je me répète mais, une fois de plus, la misère journalistique me claque au visage. Avez-vous remarqué comment tous les journaux, télévisuels ou écrits, se sont mis à parler de l'affaire "DSK"? La Terre s'est une fois de plus arrêtée de tourner pour commenter les frasques présumées du personnage. Mais c'est dans la lignée de toutes les informations qu'on nous donne en pâture depuis des mois, voire des années: dès que c'est un peu cru, un tantinet scandaleux, un brin sensationnaliste, tous ceux qui se flattent d'être les chevaliers de la vérité et de l'information se ruent sur le moindre ragôt comme des vautours sur une charogne. Pardonnez l'image mais c'est véritablement ce que ça m'évoque. Pourquoi cet empressement pour la laideur, la rumeur, le potin qu'on érige à bras-le-corps comme une Vérité avec un grand "V", alors qu'on en a, dans les faits, aucune idée ni aucune preuve? Parce que ça attire la masse. La masse, c'est nous. Le peuple s'arrache les revues, s'agglutine devant les écrans pourvu que les "journalistes" lui serve des histoires raccoleuses. Et chacun, d'y aller de son propre jugement, condamnant ou défendant l'objet du reportage, sans avoir plus de preuves que le pseudo journaliste qui a jeté le potin en pâture. C'est rendu loin, là. Prenons l'exemple de DSK: c'est une histoire glauquissime par excellence! Je veux dire que ce soit vrai ou non, c'est affreusement pitoyable: si les faits allégués sont prouvés, cela démontrera qu'un homme puissant s'est cru suffisamment au-dessus des lois et de l'humanité pour bafouer les droits d'une femme. Si les accusations sont établies comme fausses, cela mettra en lumière la cupidité de la dite femme, prête à ruiner la vie d'un homme pour de l'argent, voire pour servir les intérêts de quelques autres. L'une et l'autre des issues de cette histoire sont affreusement laides. De la charogne, comme je disais. Et les journaux, la télévision, ne parlent que de cette carcasse putride car nous, masse, nous y accordons du crédit. Nous éprouvons le besoin d'avoir un avis sur la question: bon ou mauvais, nous devons villipender l'un ou l'autre des acteurs de ce mauvais film.

Il n'y a pas si longtemps, je voulais faire journaliste. Je trouvais que c'était un métier remarquable, valorisant la liberté d'expression. Pour moi, le journaliste, c'était un genre de justicier de l'information - celui qui, neutre et courageux, allait au coeur de tous les grands événements de ce monde, qu'ils soient heureux ou malheureux. Il en existe encore, de ces quelques amoureux de leur métier, qui préfèrent toujours enquêter, chercher la vérité derrère les paillettes qu'on leur jette aux yeux. Je n'ai qu'à citer Alain Gravel ou encore Anne Nivat pour que la beauté du métier rejaillisse. Mais il semble que l'argent domine généralement ce métier, comme il s'immisce dans toutes les sphères de notre réalité. Aujourd'hui, ce qui compte, c'est l'audimat, c'est le nombre de vente, c'est donc ce qui est populaire. Et ce qui est populaire, c'est la charogne. Pourquoi ça nous intéresse autant de savoir que Madonna se tape son danseur ou que Trucmuche a trompé Chose? Notre vie est-elle si plate que nous devions nous gargariser avec celle des plus célèbres que nous? Et quand bien même, il y aurait cette petite part de nous qui veut savoir si la fameuse femme du Sofitel a menti ou non, cela doit-il occuper à ce point toute l'information? C'est bien simple, au journal de Radio-Canada, deux sujets accaparent les vingt premières minutes des Nouvelles (qui en durent trente) : les innondations des villages proches du fleuve et la déchéance de DSK. Parce que, bien-sûr, c'est encore plus vendeur si on sous-entend à toutes les phrases que l'homme est coupable - peu importe que le procès ait eu lieu ou non. La Lybie et la Syrie sont, semble-t-il, des dossiers réglés, le Japon et sa centrale branlante, aussi, peut-être évoqueront-ils rapidement la tornade dans le sud des Etats-Unis mais ça va se poser là. Aujourd'hui, quand on est journaliste, il semble qu'il faille faire son beurre avec la charogne ou bien faire partie de programmes plus marginaux, que seuls les plus motivés écoutent. Aux heures de grande écoute, le potin passe mieux que la misère du monde.

Notez, je suis bien au courant que la subjectivité de certains journalistes et journaux est avérée depuis longtemps. Il n'est pas rare que nous, membres de la masse, nous achetions les papiers qui correspondent le plus à nos idéaux, de façon plus ou moins consciente. On trouve que ceux qui écrivent dans les autres sont trop engagés et prêchent pour leur paroisse, sans vraiment nous rendre compte que ceux que nous lisons font la même chose sauf que nous partageons leurs idées. Mais je trouve que cette partialité a quelque chose de triste pour le métier de journaliste. C'est un peu comme affubler des armoiries à un chevalier: il ne serait donc plus indépendant mais appartiendrait au seigneur dont il porte les couleurs. Finalement, ce serait un peu comme si Cyrano avait accepté que Richelieu devienne son protecteur au détriment de l'originalité de ses écrits: ils auraient perdu de leur beauté et de leur puissance. C'est n'est, toutefois, que l'expression la plus évidente de notre subjectivité humaine.

2 commentaires:

  1. Au moins jusque la :
    http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=4051

    Atterrant.

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  2. En effet, c'est assez éloquent. C'est vraiment pitoyable.

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