Devient-on associable en vieillissant ou bien est-ce simplement notre vraie nature qui prend le dessus?
J'ai toujours eu tendance à ironiser sur mon côté timide à l'extrême, lorsque je ne connais personne dans un lieu quelconque, ainsi que sur ma forte tendance à fuir les bains de foule au risque de faire un malaise. Je parle d’asociabilité à tendance agora phobique, un sourire aux lèvres, et tout le monde de sourire à son tour, sans vraiment me prendre au sérieux. Remarquez, rien que de très normal: je ne me prenais moi-même pas vraiment au sérieux. Rien de mieux que le sarcasme pour dédramatiser un comportement sociétal jugé anormal. Plus le temps passe, cependant, plus je me demande jusqu'à quel point mon propos était sarcastique.
Je m'explique: il y a quelques mois déjà, un étrange sentiment désabusé s'est immiscé dans mon esprit. J'ai commencé à manquer les cours de Kung Fu, à répondre de moins en moins au téléphone et à limiter mes rencontres sociales. Au début, je pensais que c'était passager: une espèce de crise liée à mon échéancier de travail qui pèse sur chaque minute de mon existence. Mais cela ne s'est jamais estompé. Au contraire, imperceptiblement, je me muais en observatrice silencieuse qui n'aime pas être au centre de l'attention.
Je n'aime pas le téléphone parce qu'il n'y a qu'un seul interlocuteur et parce que les silences, parfois si agréables au gré d'une conversation entre amis, deviennent étranges avec un combiné dans les mains. Je suis capable d'écrire de nombreux courriels sans aucun déplaisir, bien au contraire. Parce qu'il n'y a pas cette pression du temps et parce qu'on demeure seul lorsqu'on les écrit. Cette liberté n'existe pas au téléphone. Malheureusement pour moi, la plupart du monde préfère l'invention de Mr Bell et s'y adonne plus souvent qu'à leur tour. Bilan: je ne réponds plus à la moitié de mes appels. Je réponds même parfois aux messages par courriels. Etrange, n'est-ce pas? Pourtant, je ne dois pas être complétement associable car j'aime passer du temps avec mes amis, autour d'un thé, d'une shisha, ou simplement étendue dans l'herbe d'un parc. J'apprécie ces moments mais il semblerait que je les affectionne d'autant plus qu'ils ne sont pas quotidiens. Comme si j'avais besoin d'un quota de solitude plus important que celui de ma sociabilité. De fait, c'est irrémédiable, lorsque je me lie d'amitié avec une personne, je suis très rapidement confrontée à un problème. En fait, ce n'est pas tout à fait exact: j'y ai été exposée toutes les fois, ou presque, où j'ai développé une amitié avec une fille. Cela peut paraître très cliché, et ça l'est à bien des égards, mais c'est une donnée empirique: à chaque fois que je commence à bien m'entendre avec une demoiselle, je m'aperçois que cela signifie une relation presque fusionnelle pour elle. Enfin, pas toutes, j'exagère. Ami, par exemple, semble partager mon goût pour la parcimonie et elle n'est pas la seule de mes amiEs dans ce cas. ^-^Disons que toutes les fois où j'ai été confrontée à ce côté fusionnel de l'amitié, c'était avec une demoiselle. Dans ce temps là, il faut que j'explique mes réticences et, ainsi, poser mes limites mais une fois sur deux, ma nouvelle amie comprend sans comprendre. Il faut dire que c'est étrange: lorsqu'on s'entend bien avec quelqu'un, toute personne normale ne doit pas avoir ce genre de sentiments,si?
Alors je pense que je deviens associable un peu plus tous les jours et je vais probablement finir seule, ou presque, un jour. Ou me transformer en homme, tout dépendant... En fait, je me demande si ce quota solitude qui se partage mon temps avec celui de la sociabilité ne serait pas comme le nez ou les oreilles; c'est à dire un élément qui n'aurait de cesse de croître la vie durant. Heureusement pour moi, Jules est un homme et, désormais partie intégrante de ma vie, entre dans ce "quota de solitude": sans lui, ma solitude me paraitrait bien seule!
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