L'impuissance, quel sentiment frustrant! L'impuissance d'aider des amis qui ont mal, l'impuissance de leur éviter des étapes douloureuses de la vie, l'impuissance de leur donner un peu de paix et de joie quand tout semble perdu... Il en résulte toujours cette sensation étrange de se heurter à un mur invisible et de rester là, à quelques pas à peine de cet être cher malheureux, mais trop loin encore pour lui donner notre énergie, nos bulles de lumière ou en tout cas, pour prendre un peu de ce plomb pesant sur ses épaules. Peu importe le côté rationnel de notre pensée, lorsqu'un de nos amis a mal, on se sent coupable de ne pas pouvoir faire plus que d'être là. Je me demande si, un jour, on créera une machine capable de rééquilibrer le bonheur chez les gens. Un peu comme une transfusion sanguine: tu partages ton trop plein de joie avec ceux qui en ont moins. En attendant, nous sommes là, contemplant la détresse de nos amis, si profonde parfois qu'elle nous blesse un peu aussi: les dommages collatéraux qu'on appelle ça! Mais ce ne sont que des égratignures comparées à la détresse que dégagent nos proches.
Lorsque les douze coups de minuit du 31 décembre ont mis fin à l'année 2009, j'ai poussé un soupir de soulagement. Après une année aussi riche en émotions, la prochaine allait sûrement me paraître aussi calme qu'un ruisseau en pleine sécheresse! J'aurais dû me rappeler du proverbe sur l'eau qui dort, tout ça tout ça! En quelques mois seulement, les mauvaises nouvelles ont plu avec plus de force que durant la mousson en Inde! Il semblerait que Mère-Nature ait besoin d'équilibre: tout bonheur personnel doit être compensé par la détresse de nos proches. J'ai ainsi appris que ma seconde maman avait une rechute de cancer, parce qu'une fois, ce n'est pas assez. Tant qu'à faire, autant organiser une petite sauterie de cellules folles. Pour compléter un début d'année raté, j'ai su que mon frère s'était un peu plus enfermé dans sa tête, s'isolant de ses derniers proches auxquels il parlait encore. L'impuissance se gargarise de situations frustrantes: de la séparation amoureuse à la remise en question d'une vie entière, il n'ait rien qui n'échappe à son emprise. Une douleur triste, palpable au delà du temps et des distances, et qui résonne en nous comme autant de cris de détresse. J'ai tendance à philosopher sur l'impuissance, à estimer que la seule présence est déjà un petit pansement sur une hémorragie. Là encore, pourtant, il est parfois difficile de l'être, du fait de nos choix de vie et de notre emploi du temps. Mais peut-on vraiment se suffire d'une compresse alors que nous voyons nos proches se vider de leur sang? Que peut-on faire pour soulager une douleur aussi vive?
Personnellement, il m'arrive fréquemment d'avoir un trou à la place du cœur. Une espèce de plaie béante et laide qui insuffle une douleur rampante dans tout mon être. Les moments où j'ai le plus mal, cependant, sont, sans aucun doute, lors des situations de détresse amicale: mon impuissance à décharger leurs épaules de toutes ces épreuves de vie me plonge dans une angoisse sans nom. A quoi bon être heureux si on ne peut pas partager ce bonheur avec nos proches lorsqu'ils en ont besoin?
Il y a des jours comme aujourd'hui où on a très envie de cracher sur une nouvelle année pourrie! Elle ne fait que commencer, cependant, alors on va lui laisser une chance...
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