31 octobre 2009

Réussir envers mais pas contre tout!

"-Tu n'as pas le temps de prendre un thé, bientôt?
-Non, faut que je travaille.
-Tu travailles tout le temps, tu vas finir par t'épuiser.
-Non, c'est parfait! Travailler jusqu'à l'épuisement te permet d'être plus efficace: fatigué, tu prends le chemin le plus court pour réussir ton travail.
-...Ou le bâcler."

Ce n'est pas la première fois qu'un de mes amis me vante les mérites du travail jusqu'à l'épuisement, même si les arguments ne sont pas nécessairement les mêmes. Pour mon yankee préféré, il s'agit d'un moyen inéluctable pour parvenir en temps et en heure à la fin de ses recherches, tout en lui permettant de ne jamais avoir de remords quant à la quantité de temps investi. Mon ami avec qui j'ai eu cette conversation hier, en revanche, semble y percevoir un moyen de rendre son cerveau plus efficace. Le fameux concept de "vite et bien" qui serait mis en pratique par l'inconscient afin que le corps puisse se reposer après.

Peu importe l'argument, je ne peux m'empêcher d'être en désaccord avec cette vision des choses. Elle implique trop de sacrifices que j'estime potentiellement regrettables dans notre futur. Quand je regarde évoluer mes deux amis, je crois toujours discerner des manques, des cadeaux de vie importants qu'ils sont obligés de laisser sur le bord du chemin pour pouvoir avancer selon leur envie. Mon père serait certainement d'accord avec eux: pour lui, une vie est longue et il sera toujours temps de se tourner vers le "futile" après avoir réussi: tout est question de choix. Il faut savoir faire des sacrifices, mener une vie de moine en fermant la porte à toute distraction durant les quelques années de nos études afin d'obtenir un diplôme et la possibilité de choisir notre vie. Je conçois pleinement le "bon"sens de cette argumentation mais j'y vois un certain nombre de difficultés: en consacrant tout son temps, son énergie à son travail, au point d'en négliger ses amis, ne court-on pas le risque de se retrouver diplômé, certes, mais seul?

Il s'agit d'une extrapolation, bien sûr: je ne suis certainement pas une proche de mon ami "qui n'a pas vraiment le temps de prendre un thé", et j'ignore tout de son comportement avec ceux qui comptent vraiment dans sa vie. Mon yankee préféré trouve toujours le temps pour passer un moment de détente avec moi lorsque je lui propose. Peut être qu'il en va de même pour mon camarade overbooké. Peut-être...

Mais j'avoue que je suis toujours étonnée d'entendre ce genre de discours. J'ai l'impression que si j'adoptais la même attitude, certes, je finirais mon travail plus rapidement, mais non seulement je finirais par le bâcler, voire m'en dégoûter, mais en plus, je finirais par blesser ceux qui prennent le temps de s'intéresser à moi. En les négligeant, je prendrais le risque qu'ils me tournent le dos, une fois mon ambition satisfaite, et de me retrouver seule pour fêter ma réussite... Peut être suis-je tout simplement un brin trop fumiste et que je me cherche des raisons pour continuer à partager des moments simples avec mes amis, pour poursuivre mes envolées littéraires et tout ce qui pourrait s'avérer être une "distraction". Sûrement. Après tout, j'ai toujours privilégié cette voie, cette manière d'aborder le travail et la vie en général: je recherche la reconnaissance de ma famille et, dans ce but, je vais tout mettre en œuvre pour réussir mes études. Mais il y a des choses sur lesquelles je ne concevrais jamais de marcher pour parvenir à mes fins: mes amis sont le principal trésor de cette vie. A quoi me servirait toute la réussite du monde s'ils n'étaient plus là ?

Mais au fond, la conversation avec mon "ami qui cherche l'efficacité dans l'épuisement" n'est qu'un prétexte à une piste de réflexion sur les sacrifices qu'impliquent des cursus étudiants très demandant. Encore une fois, je ne suis certainement pas assez proche de lui pour me targuer de faire partie de ses priorités de distraction donc son refus n'est en rien un indice d'une négligence amicale de son côté. Je lui souhaite de tout cœur de réussir à réaliser ses rêves sans devoir poser des actes qu'il serait amené à regretter plus tard. Ce qui fait la valeur des choses est souvent lié au regard des gens qui comptent pour nous: seul, rien n'a vraiment de sens...

28 octobre 2009

Mesquinerie Frustrante!

Résidence Permanente, épisode deux.

Hier matin, armée de mes papiers manquants, je me suis rendue au bureau d'immigration pour compléter mon dossier. J'ai préféré m'y rendre en personne car mon amie, qui a déposé sa demande presque en même temps que moi, m'avait informée que les courriers pouvaient prendre jusqu'à trente jours pour parvenir au bon destinataire dans ces bureaux: en vélo, il m'a fallu quinze minutes! C'est à se demander si les étapes administratives visant à trier le courrier ne sont pas simplement là pour gripper les rouages de la machine. Au fond, il a quand même fallu presque cinq mois à la personne traitant mon dossier pour m'informer qu'il manquait trois malheureux papiers...

Bref, ayant appelé Mme P. plus tôt dans la semaine afin de m'assurer de sa présence, elle m'avait conseillée de l'appeler avec mon cellulaire, une fois rendue devant l'immeuble, afin qu'elle descende. Oui mais voilà: je n'ai pas sa ligne directe et je dois passer par l'accueil. Je compose donc le numéro, adossée au mur de l'entrée, contemplant avec un air incrédule les deux fonctionnaires, confortablement installées derrière leur comptoir, qui ne tentent pas même un geste pour décrocher. Elles devaient venir de se vernir les ongles, je suppose: il ne faudrait pas que la décoration s'écaille!

-"Cliché!"

J'avoue. Cela dit, elles n'ont rien fait pour me prouver que ces préjugés étaient foncièrement faux! Voyant que je ne tirerai rien de la voie téléphonique, je décidai de me rendre directement au comptoir pour demander à ce que Mme P. descende chercher les papiers. La dame m'écoute avec attention, hoche la tête lorsque je lui exprime mon désir qu'elle appelle Mme P, et se remet à tapoter sur son clavier en silence. Au bout de dix minutes, je m'interroge sur ma consistance corporelle: est-ce que ma requête n'était qu'une projection de mon esprit ou bien est-ce que mon interlocutrice préférait terminer sa partie de Solitaire avant de décrocher le téléphone? Je demeure d'une impassibilité admirable, appuyée sur le comptoir, suivant chacun de ses mouvements avec un regard vide. Enfin, l'employée se décide à appeler Mme P.: elle tombe sur le répondeur et, trouvant sans doute superflu de mentionner que quelqu'un attendait en bas, elle se contente de lui demander de la rappeler. Mon incrédulité face à la compétence de mon interlocutrice grandit un peu plus et je ne peux m'empêcher d'avoir un instant d'hésitation lorsqu'elle m'invite à patienter dans la salle d'attente. Pas que j'ai autre chose à faire que de compter les mouches au plafond, mais j'ai autre chose à faire! Je finis par obtempérer, cependant, consciente que, de toute façon, je n'existe déjà plus pour mon interlocutrice qui s'est relancée dans son tapotage de clavier.

M'asseyant près de l'entrée, je remarque alors la seconde personne présente dans la minuscule pièce, en grande conversation avec l'autre employée de cette magnifique institution. Je n'entends que des bribes de ce que le requérant désire alors que son interlocutrice est, semble t'il en train d'entrer en phase d'hystérie profonde! Le monsieur désire un CAQ ( Certificat d'Acceptation du Québec: papier nécessaire à tout visa de résident temporaire dans la belle province!) et il a préparé son dossier afin de l'obtenir immédiatement: pas de chance! Aucune demande n'est traitée avant un délai de trente jours, lui répond agressivement l'employée. Le monsieur insiste et provoque chez la fonctionnaire cette réaction qui n'a pas fini de me surprendre:

-"Vous ne l'aurez pas aujourd'hui, Monsieur! ça suffit maintenant: ça devient dangereux! Gardien!"

...

"Dangereux"... Au sens de: "Il y a un danger qui se profile à l'horizon" ? Non parce que, personnellement, je ne sens pas l'air lourd de menaces! Pour être franche, le principal risque que je pourrais concevoir serait ma possible surdité, imputable aux cris d'Ofraie que pousse la dite fonctionnaire supposément apeurée! La gardienne ( car oui, c'était une femme), armée de tout son courage, s'empresse d'appeler du renfort pour maîtriser ce candidat à la violence dont les gestes et les paroles sont aussi nerveux que s'il était sous Prosac. Le soutien arrive: un homme devant m'arriver à l'épaule se précipite dans la salle, tandis que le requérant, avec un sang froid impressionnant, ignore la panique générale pour continuer à plaider sa cause. Le petit homme, craignant peut être que le "coupable", d'un calme placide, décide soudain de forcer le passage et de s'enfuir dans l'immeuble, ferme la porte et fait un barrage de son corps impressionnant...

Au bout de quelques minutes, durant lesquelles le monsieur voulant le CAQ ne lâcha pas prise, l'employée craque et fait son travail: elle lui donne les instructions pour qu'il puisse soumettre sa demande à un agent et lui intime l'ordre d'écrire une lettre expliquant son cas. Dans un silence glacé, l'homme, heureux d'avoir une information, se rend au bout de la salle pour rédiger son courrier. Aucun des autres protagonistes ne le lâche des yeux, de peur, j'imagine, qu'il se serve du stylo sorti de sa poche comme d'un poignard ou d'un détonateur! Sait-on jamais: c'est un classique dans Rambo IV! La lettre écrite, le potentiel malfrat revient voir l'employée qui, sèchement, l'invite à aller rencontrer une personne X au quatrième étage. Bien sûr, le courageux gardien de un mètre vingt se précipite pour ne pas le laisser s'éloigner seul: les mauvaises personnes, il les sent, lui!

Personnellement, j'étais tellement estomaquée par la scène de folie pure à laquelle je venais d'assister que j'en avais oublié que j'attendais déjà depuis vingt minutes...J'allais me lever pour signaler ma présence à la championne de Solitaire, siégeant calmement à côté de l'employée hystérique, lorsque cette dernière se saisit du téléphone pour appeler le secrétariat du quatrième étage. Elle lui raconte brièvement le scénario du dernier film d'action à la mode., avec un air renfrogné.. Ah non, pardon! Elle lui narre ses mésaventures avec le monsieur désirant un CAQ: étrange version qui me rappelle un mauvais film d'horreur mais absolument pas la scène à laquelle je viens d'assister. Je souris devant une telle mesquinerie de la part de cette petite femme. Sa dernière remarque, cependant, transforme mon amusement cynique en horreur profonde:

-"En tout cas, dis lui qu'il n'y a aucun agent de disponible pour le recevoir!"

...

Puis-je m'exclamer "OUACH"! Sérieusement! Cette petite fonctionnaire frustrée, en plus d'être hystérique, s'applique à mettre des bâtons dans les roues d'une personne qui lui a fait confiance pour l'aider dans sa démarche d'immigration! C'est absolument infâme! A quel moment dans la vie de cette femme s'est elle transformée en harpie aigrie qui joue avec la vie des gens en fonction de ses humeurs? J'étais profondément choquée. Peu importe le pays, la situation, il y a toujours des petits fonctionnaires mesquins pour se penser meilleurs que les autres et pour, ainsi, abuser de leurs minuscules responsabilités!

Mme P. est enfin descendue. Je lui remets mes papiers dans un état second, incapable de détacher mon regard, empli de dégoût, de cette petite femme blonde qui fait mine de se concentrer sur ses papiers. Je ne peux m'empêcher de me demander comment elle parvient à justifier ce type de comportement lorsqu'elle se croise dans un miroir. Combien de personnes a t'elle ainsi court-circuité afin de satisfaire son maigre pouvoir personnel?

J'avais envie de l'invectiver, de lui lancer ma manière de penser au visage. Mais je n'ai rien dit, songeant que je m'attirerais sûrement plus de problème qu'autre chose. Bref, je n'ai pas eu assez de cran, une fois encore, pour mettre des mots sur les nausées qu'elle me donnait. Alors, je ne suis pas mieux qu'elle car assister sans rien dire à un tel abus de pouvoir n'est pas moins grave que de le commettre. Mon côté individualiste a primé et j'en ai honte, encore, ce matin...

26 octobre 2009

Lumière angoissante au bout du tunnel!

Ce n'est pas la première fois que j'en parle dans ce blog et ce ne sera sûrement pas la dernière: à bien des reprises, je me suis épanchée sur les difficultés d'être en thèse et de s'investir pleinement dans une étude qui ne s'avère pas simplement longue mais aussi angoissante par son côté trop spécialiste. Souvent, il m'arrive de postuler à des emplois, de chercher la conversation à propos d'un avenir brumeux, simplement pour me rassurer et me dire que je ne suis pas simplement en train de mettre, une fois encore, trois, quatre, voire cinq ans de ma vie entre parenthèses. Pour l'heure, cependant, quoique j'ai souvent des moments d'angoisse et une envie sourde de tout abandonner et disparaître de la vie courante, je retrouve toujours le chemin de la raison car il me reste un peu de temps devant moi.

Une de mes amies est, elle, à une semaine de déposer. Au prime abord, et d'un point de vue extérieur, ce ne serait que liesse et empressement qui devraient illustrer son état d'esprit. Oui mais voilà: ce serait compter sans le côté émotionnellement impliqué de tout un chacun. Lorsque depuis cinq ans, ta vie se résume à ta thèse, alors que tu te défends seul, car tes directeurs sont trop peu professionnels et compétents pour te soutenir comme ils le devraient, afin de réussir dans ton domaine, la perspective de la fin a toujours quelque chose d'angoissant et de profondément effrayant. Mon amie a une fin de thèse difficile et nous n'avons guère d'autre moyen de la soutenir que celui d'être là, présents pour elle et pour l'encourager, tentant d'amoindrir autant que possible les commentaires si peu pertinents de ses directeurs si peu compétents. L'attitude profondément égocentriques de ces deux personnages provoquent toujours chez moi une rage sourde: je ne peux comprendre comment des professeurs, reconnus de leur milieu, peuvent se targuer d'être capables de diriger des recherches alors qu'ils ne sont pas même aptes à lire les travaux qu'on leur rend, à encadrer comme il se doit leurs élèves et, surtout, à les encourager dans leur travail. Les directeurs de mon amie se comportent avec elle comme si elle était une concurrente à éliminer, une menace potentielle dont il faudrait se débarrasser immédiatement en lui cassant son moral: y a t'il plus incohérent comme comportement que celui-ci, venant de ses propres meneurs de recherches? Existe-t'il quelque chose de plus frustrant, après avoir passé autant de temps, d'énergie, après avoir mis autant d'espoirs dans des travaux qui ont représenté cinq ans de sa vie?

Ce manque de reconnaissance crasse mine mon amie qui a du mal à juste passer outre. Mon yankee préféré, son compagnon de vie, tente de lui enlever un peu de ce poids trop lourd qui pèse sur ses épaules mais il est toujours difficile de lutter contre la négativité des autres. Il semblerait que notre être ait toujours plus de facilité à prendre pour argent comptant les mauvaises critiques et à ne laisser aucune place aux compliments. Au fond, il semblerait que rien n'est facile dans la démarche d'un thésard: même la fin prend des airs de montagne infranchissable! Il reste moins d'une semaine à mon amie pour terminer. Face à cette angoisse irrépressible, j'aimerais être ma maman pour pouvoir croire aux bulles de lumière et d'énergie afin de l'aider à franchir les derniers mètres qui la séparent de sa nouvelle vie! Quoique déjà primordial, être simplement là dans les moments difficiles paraît parfois tellement insuffisant pour les proches...

23 octobre 2009

Escapade à Nicolet, Yamaska

Poudre diamantée saupoudrant le noir macadam, la neige hivernale a signé sa première descente des cieux cotonneux hier soir. Outre le caractère un brin déprimant de sa chute prématurée, elle a également laissé des relents de glace dans l'air et mes derniers jours de cycliste aguerrie s'annoncent propre à la "cryogénisation"...Vous me direz: ce n'est pas comme si nous sortions d'une longue période estivale. Avec les moussons des dernières semaines, il va sans dire que ce n'est que tomber de Charybde en Scylla. Hier soir, cerise sur le gâteau, je revenais tout juste de mon expédition à Nicolet Yamaska, pour mes archives, au volant de la monstrueuse, gigantesque, gargantuesque Caprice Chevrolet.

-"C'est une voiture américaine?"

Oui mais c'est surtout un tank. Elle est tellement longue et large qu'il est possible d'y monter à six, trois à l'avant, trois à l'arrière, et de déménager un appartement au complet en trois voyages! Personnellement, je m'étais toujours refusée à la conduire, tant son apparence me laissait imaginer le pire. Là, je n'ai pas eu le choix: Nicolet est un mini village situé à proximité de Trois Rivières. Je devais aller consulter des archives au Musée des Religions et une de mes amies s'était fort aimablement proposé pour m'accompagner dans ce coin de pays. Le séjour fut fort agréable mais riche en événements étranges. Déjà, j'ai eu un élan de compassion pour tous les artistes qui sont trop célèbres pour aller s'acheter du dentifrice sans lunettes de soleil!

-"Vous étiez connues?^-^"

Non, mais c'était bien là le problème. Dans un si petit village, la population voit venir de loin les étrangers. En entrant dans un Subway, toute la clientèle se tournait vers nous, nous dévisageant comme si nous étions la réincarnation d'Hannibal Lecter. Il en a été de même lorsque nous marchions le long de la route: les gens au volant de leur voiture se retournaient pour nous regarder passer. C'était vraiment étrange. Mon amie a tout de même trouvé le moyen de se perdre et de faire plus d'une heure et demie de marche afin d'atteindre un parc situé en bordure de la ville. Étant donné qu'elle avait gardé les clés de la voiture sur elle, j'ai demandé à notre hôte, un très gentil monsieur, quoiqu'un peu trop catholique à mon goût, qui est allé la chercher au bout du monde! Notre gîte, le cherche-étoile, était très agréable. Le couple qui le tenait était fort sympathique et serviable et ils nous ont même fait faire un tour du village pour nous en conter son histoire.

Finalement, le séjour était très agréable: avoir quelqu'un avec soi rend les soirées bien moins longues, peu importe où nous sommes! ^-^Nous avons découvert une région du Québec pour la moins originale: nous ne serions probablement jamais passé par Nicolet autrement! Au départ, nous devions aller à New York, mais finalement, c'est très surfait la Grosse Pomme! ^-^Rien ne vaut la découverte de notre belle Province! De plus, à notre retour, mon amie a eu la joie de recevoir son Certificat de Sélection du Québec. Alors, tout est bien qui finit bien! ^-^

17 octobre 2009

Cri du coeur!

C'est une tendance très à la mode: tout le monde s'y adonne, artistes ou particuliers, sur la scène publique ou lors de conversations privées. C'est un lieu commun mais pourtant si agréable que je ne résiste pas à la tentation d'en produire un à mon tour.

-"Tu as lancé un réseau de commérages sur Céline Dion?"

Non, mais ce sera ma prochaine action, n'en doutez pas! ^_^ Enfin, après avoir créé celui sur la Dynastie Sarkozy, bien sûr: pas de famille royale sans revue à potins! Bref, ce n'était pas vraiment de cela dont je parlais. L'objet de ces quelques lignes, qui n'en finissent d'ailleurs plus, je crois que je deviens pas mal bonne pour les digressions et les incises, est:

*Roulements de tambour*

Le paragraphe sur les motifs de notre frustration sociale au quotidien!!!!

-"Tout le monde fait ça?"

Oui, je trouve. C'est un peu la méthode préférée des humoristes pour rejoindre un large public et tout un chacun, au moins une fois, s'est arrêté dans une conversation pour rendre compte des petits riens de vie qui nous tapent sur les nerfs. Voici donc ma pierre à l'édifice:

A l'instar de tout le monde, j'adhère aux grands classiques tels que la maudite cenne brune dont tu ne sais jamais vraiment quoi faire avec et pour laquelle tu te sens super "cheap" d'attendre à la caisse. Ce qui me rend particulièrement nerveuse, cependant, comme j'ai pu l'illustrer à plusieurs reprises dans mes billets, demeure l'administration et ses employés. Pourquoi doit-on, notamment, remplir tous les ans les mêmes papiers d'inscriptions avec les mêmes informations pour s'inscrire dans la même école et pour le même diplôme? Il en est de même pour la sécurité sociale, les impôts, le chômage, et j'en passe! Toutes les administrations n'ont de cesse de redemander sans arrêt les mêmes renseignements sur notre vie alors que, sincèrement, la seule chose qui serait susceptible d'avoir changé serait la situation matrimoniale: à priori, je resterais née le même jour et je n'aurais pas non plus changé de sexe! C'est à se demander pourquoi on a inventé l'informatique... C'est un peu comme les commentaires de Joël Bouchard ou de Benoît Brunet lors des matchs de l'équipe de Hockey du Canadien de Montréal: on les retrouve à chaque match et on se demande à chaque fois quel est leur intérêt.

-"Wow! Quelle belle analogie...!"

Héhéhé! Je sais: ce doit avoir un lien avec le fait que je regarde un match en ce moment et qu'ils me donnent encore des boutons. C'est impressionnant comment des commentateurs sportifs ont le don de parler comme s'ils avaient la science infuse! A les entendre, tu les mettrais sur le terrain et ils gagneraient tous leurs matchs 40 à 0. Enfin, je me perds, une fois encore, dans les méandres de mes digressions! ^_^

Bref, au fond, ce petit cri du cœur avait surtout un but de soulagement. Parce que, même si nous y sommes confrontés à chaque jour, nous ne nous habituons jamais vraiment à ces incongruités administratives. Les réactions des employés provoquent toujours chez moi la même perplexité: à quel moment l'être humain parfaitement normal qui se tient en face de moi derrière le comptoir est devenu une personne obtuse, fermée et dénuée de la moindre compréhension sociale pour répondre à une étudiante, vivant à l'étranger, qui a déclaré un revenu de 5000 euros sur l'année aux impôts:

-"Oui mademoiselle: tout revenu perçu à l'étranger est taxé à 20 %. Vous nous devez 1031 euros.
- C'est 1/5 de la somme déclarée, madame, et je suis étudiante: je ne les ai évidemment pas.
- C'est la Loi, mademoiselle. 20 %. "

Aaaah... Nous vivons quand même dans une belle société...

15 octobre 2009

Abus d'existence.

"Pardon", "Je m'excuse", "désolée",... Autant de mots que je déclame ma vie durant. L'un des multiples psy-suffixes, que j'ai côtoyé lors de mes années sombres, m'avait un jour déclaré que cette façon de m'exprimer était une illustration de mon mal-être: en somme, en demandant sans cesse pardon à tout et partout, je voulais qu'on m'excuse d'exister. A bien y repenser, la logique semble évidente quoique partiellement tordue. Cette démarche a beau s'avérer inconsciente, elle paraît tout de même un moyen étrange pour disparaître...

Pourquoi m'interrogeai-je, aujourd'hui, sur une tendance qui devrait, au regard de mon état de santé actuel, avoir disparu? Eh bien, tout d'abord, parce que ce n'est pas le cas et ensuite car réfléchir sur cette question m'a permis d'analyser un comportement sociétal plus global qui, à mon sens, relève d'une profonde incohérence. Je m'explique: ma forte tendance à l'excuse perpétuelle, à tort et à travers, semble s'opérer comme un tic de langage. Quand bien même je voudrais me taire, le mot fuse avant que j'ai pu songer à l'arrêter. J'ai pleinement conscience que, sur le long terme, la multiplication d'excuses dès que j'ouvre la bouche doit avoir un effet rébarbatif pour l'auditoire. Généralement, d'ailleurs, celui-ci se sent obligé de me rappeler que je n'ai pas forcément besoin de m'excuser pour toute la misère du monde à chaque remarque qui m'est faite. Il en tire alors une image plutôt fragile et peu confiante de ma personne, image qui, si elle n'est pas totalement dénuée de sens, s'avère très exagérée par rapport à la réalité. Mais j'en conviens: une personne qui demande pardon à un pied de table qui vient de lui ruiner l'orteil paraît peu solide. En fait, je pense que le recours à l'excuse en tout temps agit surtout comme un bouclier dans des situations de malaises: plus il se manifeste, moins je dois être à l'aise avec mon interlocuteur ou interlocutrice. En clair: moins je connais la personne et plus je pense que je lui apparais comme un être incapable, voire stupide, ce qui a tendance à provoquer chez moi une envie de disparaître, d'où l'excuse par container!

-"Wow! C'est un tempérament de battante que tu as!"

Oui, j'avoue. Comme réaction, c'est pas forcément la meilleure. Qui plus est, elle a souvent un effet amplificateur sur le ridicule de la situation, l'interlocuteur me prenant en pitié... Notez, cependant, que s'il n'en tenait qu'à moi, je ne m'adonnerais pas à cette tendance d'auto-flagellation verbale sans but. C'est un réflexe qui a le même effet que celui que j'évoquais dans le Sang des mots: à trop l'user en tout sens, l'excuse n'a plus de sens... Ce qui me pousse à le mettre en lien avec le malaise d'une relation sociale ou d'une situation est le simple fait, tout aussi condamnable, que je m'excuse fort peu avec des personnes que je connais bien. C'est une très mauvaise chose également: il faudrait, une fois encore, avoir recours à ce "juste milieu" qui régit nos existences. Je ne devrais pas être autant persuadée de mon bon droit lorsque je côtoie des proches alors que je voudrais me transformer en mur, en goudron ou en carrelage, en présence de toute autre personne...Au fond, c'est exactement comme si je devenais une autre personne selon le contexte, une image étrange et fragile au prime abord, qui devient de plus en plus trop sûre d'elle au fur et à mesure de la profondeur des relations. C'est là que réside l'incohérence sociale que je soulignais au départ: cela revient à jeter les fondations d'une relation humaine sur une publicité mensongère. A l'instar des débuts d'une relation amoureuse: tout doit être propre, beau, parfait et puis le temps efface les efforts pour laisser place au quotidien et à la réalité. Quel comportement étrange...

Mercredi soir, au cours de Kung Fu, l'une des mes camarades de l'oiseau aux grandes ailes m'a fait un très gentil compliment:

-"J'ai reçu un mail de toi pour les pièces de Fujiao cet été. ça m'a vraiment surprise: c'est un vrai talent de pouvoir écrire de même."

Merci beaucoup. ^-^ Peu importe la manière, l'endroit ou l'objet, un compliment sur ce qui nous tient à cœur est toujours un merveilleux cadeau de vie. Il devrait, sans cesse, nous rappeler que tout se mérite et que rien ne nous est dû. En somme, il ne nous reste plus qu'à trouver l'être juste entre celui qu'on projette et celui qu'on devient.

Force et Honneur, comme disait l'autre.

8 octobre 2009

Le bonheur des Jardins!

Un petit double post, parce que c'est quand même très amusant. Petite remise en situation:

Dring Dring Dring! (Ce que je fais bien la sonnerie de téléphone quand même! Quoique... La mode voulant qu'on ait tous des chansons comme indicateur d'appel fait que je devrais plutôt écrire les paroles d'une chanson à la mode...)

-"Allo? (Oui, je réponds au téléphone parfois.)
- Mme Boutevin? Ici, T****a (J'ai rien compris) de la banque Desjardins. Vous allez bien? "

Ben, ça allait pas si mal jusqu'à ce que tu m'appelles en fait. Là, je me demande ce qu'une institution bancaire peut vouloir à une misérable étudiante comme moi:

-"Je vous appelle pour vous informer que nous avons désactivé votre carte débit!
- ?? Euh...Pourquoi???
- Je sais pas."

Ahahahah! Excellente réplique. Non, je veux dire: un instant, j'ai cru qu'elle avait dit "NOUS" avons désactivé votre carte et je me suis donc imaginée qu'elle était au courant des raisons pour lesquelles"Nous" avait jugé bon de me couper mon moyen de paiement. Oui, je sais: si j'avais plus souvent du liquide sur moi, je pourrais être moins dépendante de cette petite carte. Mais, en même temps, ça incite à boire je trouve.

-"???"

Si, si! J'ai un très sérieux raisonnement dessous mais je vous expliquerai une autre fois: là je dois en finir avec la dame qui use du "nous" sans vraiment savoir à quoi le pronom renvoie.

-"Il vous faut passer nous voir pour en faire faire une autre que vous n'aurez que dans quatre jours!"

Yeah! ça tombe bien: je pars pas du tout en fin de semaine avec des amis dans un chalet. On comptait pas manger de toute façon: le jeûne, c'est la santé, comme disait l'autre...

-"Et il vous faudra aussi vérifier les dernières transactions au cas où il s'agirait d'un clônage."

Mmh...Puis-je me faire ainsi, de manière complétement frauduleuse, rembourser les 700 dollars payés à l'Université pour mon absence totale de cours???J'imagine que non.

Bref, il n'y a pas à dire, à l'instar du corbeau de Lafontaine, on ne m'y reprendra plus! ^-^

Quête Humanitaire

"Faîtes que le rêve dévore votre vie, afin que la vie ne dévore pas votre rêve".

Clamait Saint Exupéry. Heureux homme qui a cherché à nous donner un peu d'espoir quand la vie elle même ne semblait plus y croire. Cela dit, pour ma part, j'aime beaucoup cette citation: elle me donne l'impression que rien n'est impossible, puisque le rêve peut vaincre la vie plate et sans but de notre quotidien... Enfin, dans un monde idéal: il est évident que nous aurons toujours plus de facilité à réaliser nos rêves que le petit garçon des bas fonds de Bogota...En même temps, lui, il ne l'a sans doute jamais entendu cette phrase de Saint Exupéry. Que le monde est bien fait, quand même!

-"..."

Ouais, je m'excuse. Une soudaine envie de cracher dans ma soupe intellectuellement: après tout, je râle contre les injustices sociales, contre l'inégalité des chances et la misère dans le monde, confortablement installée dans un siège de bureau, au chaud, en contemplant d'un air las, à travers la vitre de ma fenêtre, les feuilles mortes de l'automne qui entament leur course vers leur destin: devenir du humus. Il est tellement aisé de se plaindre du monde quelques heures par jour, voire par semaine, avant de reprendre notre quotidien confortable. En même temps, tout quitter pour aller vivre en sac à dos sur la montagne Hu-Chan au fin fond du Tibet ne changera pas la face du monde. Alors que faire?

J'ai eu, un jour, une discussion assez connexe avec mon yankee préféré: il m'expliquait qu'il n'aimait pas vraiment le concept des missions humanitaires car elles avaient un relent de colonisation et de supériorité. Je comprends un peu ce qu'il veut dire mais je ne suis pas tout à fait d'accord. En fait, j'en conviens, débarquer dans un pays avec notre savoir, nos moyens et toute notre arrogance en prétendant venir, sinon civiliser (on ne fait plus ça, voyons! ...), du moins "aider" les populations en difficulté, alors même que nos propres gouvernements, très souvent, cautionnent les instabilités politiques et les guérillas, cela donne un arrière goût impérialiste. Pourtant, ne rien faire n'est pas mieux. Au fond, il est trop tard pour militer pour la non-ingérence dans les autres cultures: les Européens des siècles derniers ont déjà fucké le chien", comme on dit par ici. (Notez la finesse de cette expression qui me laisse toujours un sourire aux lèvres...)Ce serait presque pire, à mon sens, sous prétexte que nous ne voulons pas prétendre arriver avec la Vérité avec un grand "V", de les laisser se débrouiller avec les vestiges de civilisations qu'on a piétiné pendant des siècles. Alors, certes, les missions humanitaires sonnent un peu comme un moyen pour nous, êtres chanceux du monde riche, de nous déculpabiliser face à l'inégalité sociale. En allant construire une école dans un quelconque pays défavorisé, on peut oublier le sans-abri qui quête tous les matins devant chez nous. Mais on peut aussi vouloir compenser un jeu de hasard: rien ne nous garantit que nous n'aurions pas pu naître dans la partie moche du monde et faire douze kilomètres à pied pour aller prendre un verre d'eau. De fait, face à ce coup du sort qui a, cette fois, joué en notre faveur, aller jouer les bons samaritains à l'autre bout du monde correspond à un rééquilibrage des forces... De toute façon, rien n'est jamais tout blanc ou tout noir et l'Enfer est pavé de bonnes intentions. Chacun perçoit les choses différemment et trouve le moyen de justifier son existence à sa façon. Râler dans son fauteuil au Canada est déjà un premier pas qui montre une prise de conscience des réalités qui nous entourent. Après, ce qu'on en fait, c'est une autre histoire.

7 octobre 2009

Le Sang des mots!

"Je t'aime."

Trois mots simples, supposés représenter le summum du romantisme et de l'Amour avec un grand "A". Sept petites lettres que, si l'on se fie à la croyance populaire et aux sites féminins, toute gente demoiselle qui se respecte attend, sa vie durant, de la bouche de son cher et tendre...

J'avoue: les mots sont jolis. S'ils sont prononcés par l'être aimé, ils provoquent certainement une douce sensation de chaleur tendre, un peu comme lorsqu'on mange un M&Ms, qui fond dans la bouche et pas dans...Bref! Pourtant, je ne peux m'empêcher de me demander quel sens ces quelques lettres attachées ensemble ont encore? Je m'explique:

Lorsque j'écoute ou je lis des commentaires de personnes autour de moi, que je ne connais d'ailleurs pas forcément, je remarque qu'il est devenu courant d'employer "je t'aime" un peu à toutes les sauces. Entre amis, amoureux, vagues connaissances parfois: le dire, c'est le dompter, c'est montrer qu'on assume ses sentiments et qu'on est relié à l'autre par quelque chose de solide. Combien de fois ai-je lu sur papier, sur le net, ou bien entendu, une personne dire à l'autre, fille ou garçon, un "je t'aime" enflammé par le goût de la liberté, par le besoin d'exprimer, là, maintenant, un attachement amical qu'on veut profond? J'ai pourtant l'impression que l'utiliser ainsi, en le jetant au visage de n'importe qui, n'importe comment, parce que nous sentons que, à cet instant précis, on peut se montrer excessivement libertaire avec ce sentiment, cela dénature le sens profond de ce que ces quelques lettres expriment. A force d'être utilisées partout, elles ne signifient plus rien ou, tout au moins, pas plus qu'une poignée de main ou une tape sur l'épaule. Son usage à l'overdose l'a vidé de tout son sens, plus efficacement qu'une sangsue.

Personnellement, je ne suis certainement pas la meilleure personne pour aborder cette question: j'ai beaucoup de mal à user de ces trois mots. Je vais plus aisément rédiger une lettre enflammée que prononcer ces sons aux couleurs de feu. Comme si leur sonorité pouvait me brûler par inadvertance, ou, plus exactement, comme si je salissais trop la beauté du message en le nommant. "Définir, c'est réduire" déclarait Oscar Wilde. Je semble me refuser à toute réduction du sens profond de ces mots. Alors, j'avoue, lorsqu'on est presque incapable de dire "je t'aime" aux êtres qui nous sont intrinsèquement proches, tels que notre famille ou notre amoureux, l'entendre prononcer en tout sens nous semble étrange. Cela ne veut pas dire que c'est mal: je serais bien mal placée pour faire ce genre de réflexion. Après tout, trop d'amour n'a jamais tué personne...Mais faut-il encore qu'il soit vrai, que ces affirmations, jetées comme autant de feuilles mortes un soir d'automne, ne soient pas un moyen détourné de meubler un vide sentimental, une absence de réflexion sur ce qui nous lie.

Bref, il s'agit sûrement d'un de ces phénomènes de société que je ne comprends pas. Un de ces moments de vie où je ne sais pas quel sens donné aux mots qui sont ainsi prononcés. Ou bien suis-je, tout simplement, subrepticement, devenue vieux-jeu.Tiens, oui! Ce doit être ça... Rien de bien surprenant, finalement. ^_^

5 octobre 2009

Immersion salée à l'Ovarium

J'y ai été. Enfin. Après "Détente à l'Ovarium" et "Reconnaissance Inattendue", je peux désormais écrire " Immersion salée "! Pour un rapide rappel, l'Ovarium est un établissement de massages, d'apaisement et de détente à Montréal, dans lequel j'ai eu la chance d'aller me faire masser en juin dernier. Pour me remercier du billet que j'avais réalisé par la suite, une fort sympathique personne, travaillant au département marketing du lieu, m'avait offert un "bain flottant" et un "pulsar". J'ai donc eu la joie d'aller en profiter samedi dernier.

J'avais rendez-vous à 11h15 et la jeune fille, avec qui je l'avais pris par téléphone, m'avait conseillée d'arriver quinze minutes, voire une demi-heure, avant... Bon, soyons honnêtes: à 11h12, je franchissais les portes de l'établissement.

-"Stéphanie?" me demande la réceptionniste, d'une voix douce.

Je ne peux m'empêcher de hausser les sourcils. Ou je suis l'unique cliente insomniaque qui prend rendez-vous un samedi matin ou je suis plus en retard que je ne le pense. Troisième hypothèse: la réceptionniste est voyante à ses heures perdues, et, dans le doute, je suis mieux de ne rien laisser paraître de mon étonnement:

-"Euh...C'est moi, oui..."

Sans rien perdre de son amabilité, mon interlocutrice cherche dans mon dossier les cadeaux qui m'ont été fait et s'informe de ma connaissance sur les deux activités.

-"Aucune."

Elle m'invite donc à me rendre au vestiaire pour enlever chaussures et manteaux, enfiler des gougounes (comprendre des tongs, en québécois) et revenir patienter dans la salle d'attente. La même sensation que lors de ma première visite, décrite dans "Détente à l'Ovarium", me prend: dans le calme de la pièce, avec la petite musique d'ambiance en arrière, j'ai l'impression que ma respiration résonne dans toute la salle. J'occupe mon attente en observant les installations audio autour de moi: je ne les avais pas remarquées la première fois mais elles sont nombreuses. Plusieurs amplis trônent sur les étagères, tous surmontés par un Ipod Touch, portant une étiquette les identifiant. Sur le coup, je songeai que les noms donnés aux appareils étaient des clins d'œil à quelque musique relaxante célèbre ou bien une personnification quelconque des objets. Après tout, on donne bien des noms à des vélos, alors pourquoi pas à des Ipod!

-"..."

Non? Vous ne faîtes pas ça? ... Moi non plus remarquez! Michel, c'est pas pareil! C'est parce que le prénom allait bien à sa couleur et à ses roues...

Bref, je m'égare. Je compris, de toute façon, par la suite, que mes théories s'avéraient fausses: les noms des appareils correspondant aux salles de bains flottants, j'en déduis que la musique qui sortait du lieu n'était peut être pas si spontanée que je pouvais le croire! ^-^ Donc, après quelques minutes d'attente, Alexandre, fort gentil garçon que j'avais, me semble t'il, déjà croisé chez Gab, me conduisit à ma première expérience de Pulsar.

-"Qu'est ce que c'est que cette bête?"

Je me posai la même question. En fait, il s'agit d'une salle où, allongée dans un fauteuil confortable, on vous donne des lunettes spéciales, qu'il faut porter les yeux fermés, et des écouteurs à double fonction. L'accessoire visuel projette des clignotements de lumière, à des intensités différentes selon la personne, et l'appareil auditif, sous couvert d'une musique douce, exerce des pulsations sonores. Le but de cette double manœuvre "pulsative" est de calquer les chocs électriques naturels de notre cerveau sur ceux produits par le son et la lumière afin des les ralentir et, ainsi, parvenir à un état de relaxation intense. Bon. J'avoue que, pour ma part, ce n'est pas mon activité préférée: les clignotements de lumière ont plutôt perturbé mon cerveau, déjà endormi. La chose durant une demi-heure, je fus presque soulagée de voir réapparaître Alexandre. Le jeune homme m'amena par la suite dans la salle du fameux "Bain Flottant". Il m'en expliqua les règles, puis s'évapora.

-"Alors, qu'est ce que ce fameux bain?Un lieu rempli de bouées?"

Pas vraiment, mais j'avoue que cela aurait été crédible...

En pratique, c'est un énorme œuf, divisé en deux, avec un couvercle rabattable, dont la moitié inférieure est rempli par 2000 tasses d'eau pour 2000 tasses de sel. On s'y baigne nu et, je peux en témoigner, on flotte littéralement! Cette activité dure une heure et il s'agit d'une heure de pur bonheur! A l'intérieur de l'œuf, plusieurs boutons permettent de contrôler les lumières, la musique, et l'appel à l'extérieur. Durant soixante minutes, je me suis laissée aller dans une eau tiède, douce, soyeuse, à rêver au son d'une musique de détente, tranquille. J'ai éteint toutes les lumières durant quelques instants et la sensation retirée en était troublante. Flottant dans le noir absolu, au son d'un violoncelliste talentueux, j'ai perdu mes maigres repères géographiques pour simplement me laisser dériver dans cet espace réconfortant. Le but de cette activité est clairement la détente dans un environnement fœtal et le résultat en est particulièrement efficace.

Au bout d'une heure, qui passe remarquablement rapidement, des voix d'ange s'élèvent en lieu et place du silence ou de la musique classique préalables. C'est le signal pour sortir et prendre sa douche afin d'enlever le sel collant à la peau. Propre, détendue au possible, je suis alors sortie profiter d'une délicieuse tisane aux amandes dans la salle post-activités. Soudain, le monde était beau, il ne pleuvait plus depuis une semaine sans arrêt sur Montréal, je n'avais plus autant de soucis pour mes papiers d'immigration et ma thèse: la vie était belle, simple, calme. J'aurais croisé un dromadaire bleu, sirotant une margharita dans la salle de détente que je lui aurais souri, d'un air complice.

En définitive, je suis devenue une grande fan du massage et du Bain Flottant à l'Ovarium. Lorsque nous nous sentons, inéluctablement, glisser vers la tension, l'angoisse, le quotidien affamé, rien ne vaut, quelques instants seulement, les moments de détente et de calme. Ces deux activités ont eu, à chaque fois, un effet presque magique sur mon corps et mon esprit trop pressés. Monsieur Chocolat Lindt le déclamait en son temps: "Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes"! ;)

4 octobre 2009

Chapeau, Mr Tomson Highway pour "Une truite pour Enestine Shuswap"!

Le théâtre est un monde à part, un milieu de dur labeur, d'abnégation et d'investissement personnel pour quelques instants de gloire. Une pièce, ce n'est pas un film qui passerait au cinéma et qu'on pourrait se procurer en DVD, quelques mois plus tard. Chaque représentation est unique car les acteurs sont humains et ne peuvent toujours reproduire à l'identique une même émotion. Il s'agit de spectacles de passages, qui prennent l'affiche pour un soir, une semaine, un mois: peu importe! Il finit toujours pas cesser afin de passer à autre chose. Comme pour celle de mon ami, dont j'évoquais la tenue dans mon billet Faust, de passage à l'UQAM, une pièce de théâtre qui a su venir nous chercher, nous émouvoir, nous paraît toujours trop éphémère. Mais c'est également ce caractère passager, temporaire, qui la rend si précieuse. Elle met en pratique le redondant proverbe "profite du moment présent".

Hier soir, avec des amis, nous avons été voir, au théâtre Espace Go, une pièce originale: "Une truite pour Ernestine Shuswap" de Tomson Highway, traduite et mise en scène par André Brassard. Tomson Highway est un Cri du Nord du Manitoba: il est l'un des dramaturges autochtones les plus fameux en Amérique du nord et ce n'est que l'un de ses nombreux talents. Dans cette pièce, il met en scène quatre femmes Amérindiennes, se préparant à recevoir Wilfrid Laurier, premier ministre du Canada, le 25 Août 1910. Il présente la détresse croissante de ces personnages, prisonniers de leur culture, qui se voient, chaque seconde un peu plus, restreints dans leur existence. Les actrices sont époustouflantes dans leur jeu: elles entrent pleinement dans leur protagoniste, et l'émotion est tangible. Elle gonfle, latente, tout au long des 1h55 de la pièce, avant de s'éteindre violemment dans un climax théâtral et de redescendre, tout doucement, pour tomber sur le sol aussi silencieusement qu'une feuille morte. L'histoire est poignante, les décors magnifiques, le jeu d'acteur maîtrisé, les chants merveilleux et je suis sortie de cette pièce, convaincue de sa réussite.

Pour avoir une idée d'un théâtre relativement méconnu, afin de profiter d'un moment intense, dans le but de découvrir un passage de vie trop souvent déformé, mais qui, cette fois, se plie aux exigences d'un spectacle haut en couleurs, je ne peux que vous encourager très vivement à aller voir cette pièce. Elle joue jusqu'au 10 Octobre et elle est vraiment un passage obligé.